Il y a quelques semaines, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) avait saisi le chef de gouvernement pour surseoir -d’un an- à la seconde augmentation du SMIG, qui devait entrer en vigueur en juillet 2020.
«Après deux sessions de dialogue social, aucune réponse officielle n’a été communiquée au moment où les entreprises doivent établir la paie de leur personnel», a affirmé Chakib Alj dans une correspondance adressée lundi aux entreprises membres de la CGEM.
Ceci, d’autant plus que le décret instaurant l’état d’urgence est venu suspendre les échéances sociales, fiscales et juridiques. «Nous savons pertinemment que dans les secteurs en difficulté, la hausse du SMIG aura une forte incidence sur l’emploi et rendra le secteur informel plus attractif. Or, notre responsabilité à tous est de protéger nos salariés en maintenant leurs postes et de réussir la relance souhaitée pour notre économie», a souligné Alj.
Le président de la CGEM insiste par ailleurs sur le fait que la crise sanitaire que le pays traverse a eu des effets négatifs, notamment sur l’économie nationale. À noter que la productivité des entreprises a accusé une baisse drastique, et que le niveau d’emploi s’en trouve sérieusement menacé. «Nous sommes dans un contexte de crise; le plus important est de préserver l’emploi. Les acquis des salariés sont certes importants. Mais avec ce contexte, il faut qu’il y ait une concertation autour d’une solution acceptable pour toutes les parties prenantes. Car s’il n’y avait pas le coronavirus, on n’en serait pas arrivés à discuter le sujet du SMIG. Il faut être factuel car cette hausse du SMIG est temporairement gênante pour certaines entreprises. Chaque partie doit faire un effort de son côté pour dépasser cette crise», affirme Mehdi El Fakir, économiste, consultant en stratégie et risk management. Justement, en raison de la baisse considérable de l’activité économique, en plus de l’apparition de nouvelles charges liées à la mise en place des moyens préventifs et sanitaires en entreprise, les opérateurs économiques sont actuellement dans l’incapacité d’opérer cette augmentation du SMIG qui implique aussi -automatiquement- l’augmentation des charges sociales, fiscales et patronales.
«Dans ce contexte, une augmentation du SMIG n’est pas de nature à préserver l’emploi. Elle rendrait aussi l’informel plus attractif au moment où il nous faut relancer notre économie et booster sa compétitivité, intégrer l’informel, attirer plus d’investissement pour créer de l’emploi et de la valeur ajoutée», nous explique une source auprès de la CGEM. Quoi qu’il en soit, le président de la CGEM encourage aujourd’hui les entreprises des secteurs non impactés par la crise à appliquer la seconde hausse du SMIG. Il affirme par ailleurs que «les entreprises opérant dans les secteurs actuellement en difficulté sont appelées à favoriser le maintien de l’emploi, notamment en reportant l’augmentation du SMIG».
Il est à rappeler que la CGEM a signé, le 25 avril 2019, un accord social avec le gouvernement et les partenaires sociaux afin de mettre en place un cadre de travail offrant plus d’avantages sociaux aux salariés et d’augmenter le pouvoir d’achat de ceux rémunérés au salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG). Cet accord tripartite a notamment prévu une augmentation du SMIG en deux temps, le premier intervenu le 1er juillet 2019, ainsi qu’une révision à la hausse des allocations familiales entrée en vigueur à la même date. Dans le détail, l’accord social avait prévu une augmentation du SMIG pour les secteurs de l’industrie, du commerce et des professions libérales, et du SMAG pour le secteur agricole de 10% sur deux ans, soit 5% à partir de juillet 2019 et 5% à partir de 2020.
En effet, le décret n°2-19-424 du 26 juin 2019 a prévu dans le bulletin officiel n°6790 du 27 juin 2019, que le salaire minimum légal est, à partir du 1er juillet 2019, de l’ordre de 14,13 DH/heure, ce qui équivaut à environ 2698,83 DH par mois dans les secteurs de l’industrie, du commerce et des professions libérales, au lieu de 13,46 DH/heure précédemment. Pour le secteur agricole, le salaire minimum légal pour une journée de travail est revu à 73,22 DH (soit de 1.903,72 DH/mois) au lieu de 69,73 DH/jour auparavant.
Par Sanae Raqui, LesEco