Quid de l'écrit électronique en droit marocain ?

Quid de l'écrit électronique en droit marocain ?

Publié le : - Auteur : Challenge

La loi n°53-05 relative à l’échange électronique de données juridiques,
donne une définition de l’écrit électronique qui est intégrée dans l’article 417 du dahir des obligations et des contrats relatif à la preuve littérale ou par écrit alors que cet article lui-même ne défi nit pas l’écrit en tant que tel mais présente une succession de documents pouvant être qualifiés d’écrit. Cet article dispose en effet, que «la preuve littérale résulte d’un acte authentique d’une écriture sous seing privé. Elle peut résulter également de correspondance, des télégrammes, et des livres des parties, des bordereaux des courtiers dûment signés par les parties, des factures acceptées, des notes et documents privés».
Cet article poursuit en précisant que l’écrit peut être constitué «de tous autres signes ou symboles dotés d’une signifi cation intelligible, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission». Cette défi nition de l’écrit électronique est directement empruntée au droit français (article 1316 du code civil).
Dès lors, l’écrit électronique suppose que soient remplies deux conditions cumulatives essentielles :
❚ Un ensemble de signes ou symboles.
❚ L’intelligibilité, c’est-à-dire la compréhensibilité, de la signification apportée auxdits signes ou symboles.
Le support qui véhicule l’écrit est alors indifférent dans cette défi nition.
En droit marocain, la loi assigne à l’écrit électronique, tel que défi ni ci-dessus, trois fonctions à l’instar de l’écrit support papier.
Ces trois fonctions se déclinent comme suit :
❚ La fonction de validité de l’acte.
❚ La fonction probatoire de l’acte.
❚ La fonction d’authenticité de l’acte.

1 La fonction de validité de l’écrit électronique

L’écrit électronique, comme l’écrit support papier, sert à la validité d’un acte dans les cas où la loi exige la forme écrite pour qu’un acte soit valide.
Dans cette hypothèse, l’écrit doit répondre aux conditions cumulatives ci-après :
❚ L’identification de l’auteur de l’écrit électronique doit toujours être possible.
❚ L’intégrité dudit écrit électronique doit être préservée aux stades de son établissement et de sa conservation dans les termes et conditions du dahir des obligations et des contrats tel que modifi é par la loi n°53-05 susvisée.
Il existe, cependant, deux types d’actes qui ne peuvent être établis au moyen
d’un écrit électronique. Il s’agit de:
❚ Tous les actes se rapportant au code de la famille.
❚ De tous les actes sous seing privés relatifs à des sûretés de quelque nature que ce soit, à l’exception des actes sous seing privés portant sur des sûretés qui sont établies par une personne pour les besoins de sa profession.

2 La fonction probatoire de l’écrit électronique

Le droit marocain, comme le droit français, consacre la supériorité de l’écrit comme moyen de preuve. Comme l’écrit support papier, l’écrit électronique a une fonction probatoire consistant à établir l’existence d’un acte.
Cet écrit électronique comme l’écrit support papier, est requis en matière civile dès lors que l’enjeu fi nancier dans l’acte excède 10.000 DH. Pour ce faire, l’écrit électronique doit répondre aux deux conditions d’identité et d’intégrité susmentionnées.
Il est à noter que rien n’interdit aux parties à l’acte matérialisé par un écrit électronique de concevoir un document à part spécialement consacré à la preuve de l’acte qu’elles signent. Ce document peut alors revêtir la forme support papier ou électronique dans les conditions précédemment exposées.
Quid de la signature portée sur l’acte électronique quant à l’opposabilité dudit acte aux tiers ?
La signature doit être sécurisée au sens de la loi n°53-05 et l’acte la contenant doit être horodaté.

 3 La fonction d’authenticité d’un acte

Une lecture, a contrario de l’article excluant certains actes du champ d’application de la loi n°53-05, permet de soutenir que les actes authentiques peuvent être passés sous forme électronique, notamment les actes notariés portant sur des sûretés personnelles ou réelles. Il est même possible d’affi rmer que, compte tenu de la loi susmentionnée, la signature du notaire peut être électronique même si elle est sécurisée et le document la portant horodaté.
PAR ABDELKADER AZARGUI (BDO)
Source : Challenge Du 13 au 19 février 2010

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