L’organisation de cette rencontre vient exprimer la volonté du ministère d’élargir la concertation à un plus grand nombre d’intervenants, en particulier les ONG autour de mécanismes passibles de combattre la violence à l’égard des femmes.
« Cet événement a pour objectif de relancer le débat autour du précédent pré-projet de loi contre les violences basées sur le genre en prenant en considération les discussions qui ont eu lieu, ainsi que les recommandations et les perspectives d’amendement du code pénal, et ce, dans le but de parvenir à un consensus sur ce texte législatif », souligne Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité. Cet atelier était également une occasion pour lancer un dialogue autour de l’institutionnalisation des mécanismes contre les violences basées sur le genre, la mise en œuvre des recommandations du Comité CEDAW et l’évaluation de la stratégie nationale.
Selon la ministre, le réexamen de ce projet de loi a été dicté par la nécessité de trouver des solutions adéquates aux lacunes existantes actuellement et aux difficultés liées aux textes juridiques en vigueur, soulignant que ce texte s’inspire des nobles principes de l’Islam, des valeurs de la société marocaine et des acquis réalisés par le Royaume dans le domaine de la préservation des droits de la femme.
Rappelons que le processus de cette loi a été lancé en mars 2006. Un avant-projet a été élaboré et présenté au secrétariat général du gouvernement en février 2007. Toutefois, le texte a été retiré dans l’objectif d’élargir la concertation afin d’introduire de nouvelles propositions.
Il s’agit, en l’occurrence, de donner une définition précise des violences à l’égard des femmes. Quant aux autres propositions, elles ont concerné la révision et l’annulation de certains articles du Code pénal
relatifs à la violence contre la femme et l’introduction de nouveaux articles répressifs pour combattre ce fléau.
Par ailleurs, il est important de rappeler les actions entreprises par le ministère dans le cadre de la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Il s’agit notamment du lancement de la stratégie nationale et son plan d’action, la création d’un numéro vert national au profit des femmes et jeunes filles victimes de violences, ainsi que la signature de conventions de partenariat avec les départements de la Justice, de la Santé, la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), la Gendarmerie Royale et des organisations de la société civile.
Des campagnes de lutte contre la violence à l’égard des femmes sont également organisées, chaque année, à l’occasion de la Journée mondiale célébrée le 25 novembre.
Nouzha Skalli a rappelé, lors de cet atelier, que d’importants efforts ont été consentis pour mettre en place des centres d’hébergement provisoires ainsi que des services d’accueil, d’orientation et d’appui aux femmes victimes de violence, et ce, par différents intervenants.
Par ailleurs, la ministre a insisté sur la nécessité d’uniformiser les concepts et par conséquent les outils de collecte de données au niveau institutionnel à travers la mise en place d’un système d’information sur la violence à l’égard des femmes.
Un objectif qui sera concrétisé à travers la signature d’un accord de partenariat avec le Haut commissariat au Plan qui contribuera à faire connaître quantitativement et qualitativement ce phénomène et ses répercussions.
Le ministère prévoit, dans le même sens, de lancer une enquête nationale pour connaître la prévalence de la violence basée sur le genre. Il est également prévu de renforcer les structures d’écoute et d’accueil des femmes victimes en partenariat avec les différents acteurs à travers la création de 16
nouveaux centres en 2009 en collaboration avec les ONG.
La stratégie du ministère prévoit également la création d’un centre curatif pour les auteurs de violence et l’institutionnalisation de l’Observatoire national de lutte contre la violence à l’égard des femmes.
Au programme figure aussi l’organisation de la campagne de sensibilisation annuelle qui visera la diffusion de la culture de l’égalité. « La réalisation de ces objectifs ne pourra néanmoins se faire sans l’étroite coopération des différents partenaires », souligne la ministre. En effet, selon Nouzha Skalli, le rôle des ONG reste essentiel du fait de leur expérience et de leur expertise en la matière. « L’expérience internationale peut nous être d’une grande utilité », conclut la ministre.
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La violence à l’égard des femmes et des filles est un problème à dimension universelle. En effet, au moins une femme sur trois dans le monde a été battue, contrainte d’avoir des rapports sexuels ou a subi d’autres formes de sévices au cours de sa vie. Généralement, l’auteur de cette violence est une personne connue de la victime. Les statistiques décrivent une situation effrayante en termes de conséquences sociales et sanitaires de la violence contre les femmes. En effet, selon les dernières statistiques présentées par le ministère de la Justice 15.777 cas de femmes violentées ont été enregistrés au cours de l’année 2006, soit 4,2% de l’ensemble des crimes enregistrés durant la même année. Les statistiques établies par le numéro vert au terme de l’année 2007 sont alarmantes. 10.053 appels proviennent de femmes violentées.
Les chiffres indiquent que plus de 17.511 cas de violence ont été enregistrés au Maroc depuis la date d’ouverture de la ligne jusqu’à 2007. Selon les appels téléphoniques adressés au numéro vert, la violence est présente sur tout le territoire marocain, avec toutefois une hausse de fréquence et d’acuité dans les grandes villes. Il est important de souligner que la violence revêt différentes formes : psychique, physique, économique, sexuelle et juridique. Notons que la violence conjugale occupe la première place avec un pourcentage de 82,1%. Les statistiques indiquent que 77,5% des femmes violentées par leurs maris sont des femmes au foyer. Après la violence conjugale, vient la violence sexuelle avec un pourcentage de 33,7%. La violence familiale occupe enfin la dernière place avec 31,4%.
Par Yousra Amrani
Source : http://www.lematin.ma