C’est une bombe que vient de lâcher la Cour suprême dans le conflit qui oppose le cabinet marocain PriceWaterhouse au réseau PriceWaterhouseCoopers international. Dans un arrêt datant du 30 avril dernier, la plus haute juridiction du Royaume confirme la décision de la Cour d’appel de Casablanca du mois d’octobre 2007, décision qui avait reconnu au cabinet marocain le droit de porter la marque PriceWaterhouseCoopers et d’arborer le logo du réseau en dépit de la rupture consommée avec le réseau mondial depuis le 30 juin 2006. Le numéro un mondial du conseil et de l’audit contestait naturellement à son ancien partenaire tout droit d’utiliser sa marque PWC et son logo au Maroc. Pour lui, cela pouvait créer la confusion sur le marché. Par l’intermédiaire de ses avocats, PWC international a d’ailleurs multiplié des mises en garde par des encarts publicitaires dans la presse. Mais à l’évidence, il n’a pas réussi à convaincre la justice marocaine de protéger sa marque et son logo comme il l’espérait. L’intention qu’on lui prêtait de s’installer directement au Maroc par une représentation pourrait être sérieusement compromise.
En attendant de trouver une autre formule, c’est probablement de Paris que PWC international continuera à couvrir sa clientèle marocaine, soit directement, soit à travers des cabinets locaux. A cet effet, il faudra observer la réaction de l’Ordre des experts-comptables (détenteur légal du monopole du commissariat aux comptes) dont les membres ne manqueront pas d’attirer l’attention des autorités sur l’exercice d’un cabinet qui n’est pas inscrit au tableau de l’Ordre.
· Pour les entreprises, rien ne change
Pour les entreprises, la décision de la Cour suprême ne devrait pas changer grand-chose. Les filiales des multinationales cotées sur les places financières mondiales devraient probablement garder leur doctrine, celle de se faire auditer par une signature internationale. Il en va de même de groupes marocains à dimension internationale. La plupart d’entre eux s’adressent en général à l’un des quatre grands réseaux mondiaux d’audit, PWC, KPMG, Ernst & Young et Deloitte & Touch.
La décision de la Cour suprême ne pouvait tomber au meilleur moment pour le cabinet marocain. D’ici à la fin du mois de juin, les sociétés anonymes et celles qui sont soumises à l’audit légal vont devoir procéder au renouvellement des mandats des commissaires aux comptes au cours de différentes assemblées générales. C’est au nombre de mandats que gardera le cabinet marocain que l’on appréciera véritablement la réaction du marché.
L’arrêt de la Cour suprême met (provisoirement) fin au contentieux qui opposait PWC international à son ancien partenaire au Maroc. Les deux entités marocaines n’ont jamais réussi à se regrouper malgré la fusion mondiale des réseaux PriceWaterhouse et Coopers Lybrand en 1998. Les deux structures cohabitaient en union libre. Depuis la rupture avec le réseau international intervenue à l’été 2006, chaque cabinet a repris sa totale liberté. Par ailleurs, les deux entités ne sont plus à la même adresse et chacune signe sous sa marque sous les états financiers qu’elle audite. Pendant ce temps, des rumeurs ont continué à alimenter les milieux de la profession dont une sur l’installation de PWC qui se serait appuyée sur des anciens associés de Price Maroc.
Abashi SHAMAMBA
Source L’Economiste du 15 MAI 2008