Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

Publié le : - Auteur : LeMatin

Les modalités se précisent pour la mise en place de la pièce maîtresse de l’alignement du dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sur les recommandations du Groupe d’action financière (Gafi). Il s’agit du Registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés créées au Maroc et des constructions juridiques dont le décret a été publié au B.O. Les détails des modalités de mise en place de ce Registre, qui peut y accéder et les sanctions prévues.

Le Maroc accélère l’alignement de son dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sur les recommandations du Groupe d’action financière. Le décret n° 2.21.708 relatif au registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés créées au Maroc et des constructions juridiques adopté en Conseil de gouvernement le 6 septembre dernier a été publié au Bulletin officiel n° 7024 du 23 septembre 2021 (version arabophone).
Ce décret vient en application des dispositions de la loi n° 43.05 sur la lutte contre le blanchiment des capitaux, telle que modifiée et complétée par la loi n° 12.18. Il détermine les modalités de la tenue de ce registre et les données qu’il doit contenir, les engagements des personnes déclarées, ainsi que les conditions d’accès aux informations centralisées. Le registre est créé auprès du département des Finances.
Les sociétés et constructions juridiques constituées avant ou lors de l’entrée en vigueur du présent décret disposent d’une période de trois mois afin de se conformer à ses dispositions.

Les personnes concernées
• Les sociétés établies au Maroc.
• Les sociétés étrangères exerçant des activités commerciales sur le territoire national.
• Les constructions juridiques établies en dehors du territoire national et qui ont réalisé une ou plusieurs opérations financières ou immobilières ou toute forme de prestations de service au Maroc, ou qui ont des administrateurs y résidant.
Les bénéficiaires effectifs sont identifiés comme suit :

– Pour l’entreprise
a) Les personnes physiques détenant directement ou indirectement en bout de chaîne un pourcentage égal ou supérieur à 25% du capital ou des droits de vote de la société.
b) Dans le cas où aucune des personnes physiques visées au (a) ci-dessus n’est identifiée comme bénéficiaire effectif ou s’il existe des doutes sur le statut du bénéficiaire effectif parmi les personnes identifiées au (a), chaque personne physique exerçant un contrôle sur la personne morale de quelque manière que ce soit, de jure ou de facto.
c) Une personne physique qui occupe le poste de directeur général, dans le cas où aucune des personnes physiques visées aux points (a) et (b) ci-dessus n’est identifiée.

-Pour la construction juridique
a) Le(s) fondateur(s).
b) Le(s) secrétaire(s).
c) Le protecteur, le cas échéant.
d) Le(s) bénéficiaire(s).
e) Toute autre personne physique qui exerce, directement ou indirectement, de jure ou de facto, le contrôle effectif en dernier lieu de la construction juridique.
Lorsqu’une société ou une construction juridique exerce l’un des postes ou fonctions mentionnés de (a) à (d) ci-dessus, les bénéficiaires effectifs de cette société ou construction juridique seront considérés comme des bénéficiaires effectifs.

Comment tenir le registre public des bénéficiaires effectifs et les données à y inclure
Le registre public des bénéficiaires effectifs est tenu à travers une plate-forme électronique créée à cet effet et dont dépend l’entrée en vigueur de ce décret. La base de données composée de cette plate-forme est alimentée par les déclarations des représentants des sociétés et des constructions juridiques légalement qualifiées ou habilitées à cet effet. Les informations contenues dans le registre public des bénéficiaires effectifs doivent être véridiques, fiables, à jour et sécurisées. Le déclarant fournit les informations demandées (qui sont détaillées par le décret) en remplissant le formulaire mis à sa disposition sur la plateforme électronique et en le joignant aux pièces justificatives. Il doit déposer le dossier de déclaration par voie électronique. Le dossier ne sera pas accepté s’il ne contient pas l’un des documents ou informations requis. En cas de constatation d’anomalies dans la déclaration, le déclarant est appelé à rectifier sa déclaration dans un délai de 15 jours à compter de la notification du refus. Si la correction n’est pas effectuée dans ce délai, la déclaration est rejetée. Ce refus est notifié au déclarant et est considéré comme un manquement à l’obligation de déclaration prévue par ce décret, sous peine des sanctions prévues par ce même texte. La radiation des sociétés du registre du commerce entraîne leur radiation du registre public des bénéficiaires effectifs. Les constructions juridiques sont radiées du registre public des bénéficiaires effectifs dès notification à l’autorité gouvernementale chargée des finances ou à son mandataire de la cessation de toutes ses activités au Maroc, ou lorsque ses administrateurs résidant au Maroc perdent cette qualité. Les informations contenues dans le registre public des bénéficiaires effectifs ainsi que les pièces justificatives s’y rapportant sont conservées pendant une durée de dix ans à compter de la radiation de la société ou de la constitution juridique de ce registre. Les informations contenues dans le registre public des bénéficiaires effectifs peuvent être utilisées dans le cadre de la coopération internationale, dans le respect des textes législatifs et réglementaires en vigueur, ainsi que des obligations internationales du Maroc en matière de protection des données personnelles.

Obligations de l’entreprise et des constructions juridiques
Les entreprises doivent déclarer au registre public des bénéficiaires effectifs les informations demandées au cours du mois suivant l’immatriculation de la société au Registre du Commerce ; au cours du mois suivant la modification intervenue sur les informations relatives aux sociétés ou à leurs bénéficiaires effectifs. Les constructions juridiques doivent, dans le mois qui suit la première opération au Maroc ou la désignation d’une personne résidant au Maroc en qualité d’administrateur de la construction juridique, s’inscrire au registre public des bénéficiaires effectifs et déclarer les informations relatives à leurs bénéficiaires effectifs. Elles doivent également demander leur radiation du registre public dans le mois suivant la cessation d’activité.

Conditions d’obtention des informations centralisées
Les autorités et organismes qui ont le droit d’obtenir en temps utile toutes les informations disponibles dans le registre public des bénéficiaires effectifs sont :
• L’autorité judiciaire.
• Les autorités de recherche, d’enquête, d’instruction et de suivi pénal.
• L’Unité de traitement du renseignement financier.
Le Comité national chargé de la mise en œuvre des sanctions prévues par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies en lien avec le terrorisme et la prolifération des armes, leur financement et leur mode fonctionnement.
• Des organes de surveillance et de contrôle mentionnés dans la loi n° 05.43 précitée.
• La Direction générale des impôts.
• L’Administration des douanes et impôts indirects.
• Toute autre personne qualifiée à cet
effet conformément aux textes législatifs la réglementant.
Peuvent également avoir accès à ces informations, dans l’accomplissement de leurs obligations, les personnes assujetties à cette loi (n° 05.43), moyennant paiement.


Quid des sanctions ?

Tout manquement aux obligations stipulées dans ce décret est puni d’une amende allant de 5.000 à 50.000 dirhams. Et ce, sans préjudice des peines pénales les plus sévères, et des peines prévues par la législation qui leur est applicable.
Les entreprises et leurs dirigeants, ainsi que les personnes morales et leurs gestionnaires qui fournissent des informations qu’ils savent fausses, inexactes ou non actualisées sont passibles d’une amende comprise entre 10.000 et 100.000 dirhams.

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