Les EEP en cours de dissolution : Pour quand un cadre juridique approprié ?

Les EEP en cours de dissolution : Pour quand un cadre juridique approprié ?

Publié le : - Auteur : EcoActu.ma

L’État trône sur pas moins de 225 établissements publics et 43 sociétés anonymes à participation directe du Trésor. Si au Maroc nous sommes les maîtres de la création des EEP, les achever reste une tache pernicieuse.

Un véritable empire

L’État trône sur pas moins de 225 établissements publics et 43 sociétés anonymes à participation directe du Trésor. Ces mêmes entreprises et établissements publics détiennent 479 filiales ou participations dont 54% détenus majoritairement. Un véritable empire. Le rapport sur les EEP faisant corps avec la Loi de Finances 2020 fait apparaître que ce portefeuille a généré à la fin de l’année 2018 un chiffre d’affaires de l’ordre de 238 Mds de DH et dégagé un Résultat net groupé de 10 Mds de DH.

Cela fait des lustres que les pouvoirs publics amassent des richesses tout en gardant dans l’esprit que la richesse consiste bien plus dans l’usage qu’on en fait que dans la possession. L’État était dans plusieurs cas amené à abandonner ses bijoux ou brebis galeuses tantôt pour des raisons strictement économiques tantôt pour la migration vers des modes de gestion plus appropriés.

Admettre l’échec

L’inventaire des EEP fait apparaître l’existence des établissements et entreprises en cours de dissolution ou liquidation. Selon ledit rapport, ils sont au nombre de 75. Dans son rapport publié en 2016 intitulé : « Le secteur des établissements publics au Maroc : ancrage stratégique et gouvernance ». La cour des comptes avait démembré 79 entreprises publiques en cours de liquidation. Apparemment, on ne se bouscule pas à la morgue pour récupérer les morts en vue de les enterrer. En effet, plusieurs entités siègent dans la liste des EEP en cours de liquidation depuis plusieurs décennies.

Cette situation renseigne sûrement d’un État possessif qui n’accepte pas que son Empire s’effrite et ses ex-joyaux passent dans l’autre monde. Mais les pouvoirs publics doivent admettre que la plus grande victoire c’est peut-être admettre sa défaite. Il est vrai que l’Etat n’a épargné aucun secteur d’activité pour le marquer de son empreinte de l’échec. Seulement la pire erreur n’est pas dans l’échec mais dans la capacité de dominer l’échec.

Mieux encore, des EEP même en agonisant sollicitent encore le budget de l’Etat pour demander un concours financier. Rien que pour l’exercice 2018, l’apport financier a été de l’ordre de 66 MDH.

Regard de la Cour des Comptes

Le rapport de la Cour des comptes a été très généreux dans les recommandations dans le sens d’accélérer les mécanismes associés au dénouement des opérations de dissolution des EEP. Seulement ces recommandations sont restées lettres mortes. Il est certain que le rallongement des délais de dissolution et de liquidation des EEP impactent de façon significative les intérêts de plusieurs opérateurs économiques ( fournisseurs, personnel, organismes sociaux, trésor public, organismes financiers…) On ne peut donc continuer à faire la sourde oreille.

La fin a besoin de cadre juridique

Il est temps de mettre en place un cadre juridique approprié traitant des EEP en difficulté. Ledit cadre peut toujours s’inspirer des dispositions du code de commerce traitant des entreprises en difficulté. Il faut reconnaître actuellement, on fait dans l’amateurisme et le consensus. En effet, cette opération est parfois confiée à des commis de l’Etat ou parfois à des prestataires externes. Seulement sans disposer de cadre juridique ou de référentiel réglementaire. Ledit cadre juridique est également de prévoir que la dissolution des EEP à connotation régionale ou locale généralement formée par un syndicat des collectivités locales et territoriales doit être du ressort de ces entités qui n’ont pas des ministères de tutelle administrative et financière.

Le cadre juridique doit également prévoir une intervention automatique de la Cour des comptes chez chaque établissement ou entreprise déclaré en difficulté. La mission de la Cour serait alors d’identifier les responsabilités, statuer sur les causes de la fin de l’établissement ou de l’entreprise et émettre éventuellement des sanctions à l’encontre des responsables.

Une chose est sûre : le rapport de la Cour des comptes de 2016 a laissé indifférents les pouvoirs publics qui se seraient comportés d’une manière différente si c’était le Doing Business qui intégrait dans ses multiples paramètres, le traitement des EEP en difficulté.

Écrit par : Houssifi El Houssaine

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