C’est le ras-le-bol chez les comptables agréés: le ministre des Finances et le Parlement gardent toujours sous le coude le projet de loi destiné à réglementer leur profession. Et cela dure depuis 8 ans.
Le corps de métier des comptables agréés par l’Etat a longtemps été réglementé par des textes qui ont pris un sérieux coup de vieux: le dahir du 08/12/54 et celui du 01/06/55 relatifs à la réglementation de la profession comptable. Mais cet arsenal juridique était trop lacunaire pour instaurer une bonne pratique de la profession et «permettre la protection des intérêts matériels et moraux des professionnels». Résultat: c’est l’anarchie totale, assène El Ghali Khadir, président de l’Association des comptables agréés (ACAM). Malheureusement, à l’image encore de nombreuses autres professions, tout un chacun peut s’improviser comptable, ouvrir en un tour de main une fiduciaire et offrir ses prestations aux clients. Selon El Ghali Khadir, la non-réglementation de la profession est préjudiciable au Maroc qui accuse un sérieux retard par rapport à ses voisins du pourtour méditerranéen, d’autant plus qu’il est le seul à ne pas avoir encore réglementé la profession. De plus, les chiffres sont éloquents : le Liban compte 1.700 experts-comptables et comptables agréés, l’Algérie 1.200, la Tunisie 750, le Maroc, 750, sans parler de la France qui en compte 15.000.
Les comptables agréés sont convaincus d’être au cœur de l’économie nationale. Ils ont pour fonction d’organiser, centraliser, arrêter et surveiller les comptabilités des personnes physiques et morales. Ils ont aussi compétence pour réaliser des travaux et des études de nature statistique, économique et financière pour le compte de tiers privés et publics. En somme, ils jouent un rôle à la fois de conseillers comptables et financiers et de conseillers juridiques et fiscaux. Ils interviennent également sur un autre plan: tenue de registres, organisation d’assemblées générales, formalités auprès des tribunaux de commerce… Mais pour être en mesure de produire des comptes fiables, un pro de la comptabilité se doit de posséder des compétences professionnelles incontournables et des qualités morales à toute épreuve.
Quid de la réaction des experts-comptables? Ces derniers défendent bec et ongles les prérogatives que leur confère la loi 15/89 et s’opposent, notamment, à l’idée des comptables agréés qui veulent instaurer des passerelles pour accéder à l’expertise comptable au bout de huit ans d’exercice de la profession. El Ghali Khadir assure que les comptables agréés ne veulent pas empiéter sur le pré-carré de l’Ordre des experts-comptables, à savoir le commissariat aux comptes et l’audit et «qu’ils tiennent seulement à mettre de l’ordre dans la profession».
Cadre juridique actuel
Depuis quelques années, la profession est régie par le décret n°2-92.837 du février 1993 et l’arrêté du ministre des Finances n°1909-94 du 20 septembre 1994. En vertu de ce nouveau cadre juridique, pour prétendre au titre de comptable agréé, il faut posséder un diplôme équivalent à une licence, avec option comptabilité, exercer pendant cinq ans la profession de comptable.
Chaque année, le ministère des Finances décerne aux nouveaux candidats le ticket d’entrée dans le cénacle des comptables agréés. Mais les professionnels des chiffres estiment que cette réglementation n’est toujours pas suffisante pour mettre le holà au désordre qui caractérise leur secteur d’activité.
Hassan EL ARIF
Source : http://www.leconomiste.com