La signature électronique vaut preuve juridique mais les certificateurs manquent à l'appel

La signature électronique vaut preuve juridique mais les certificateurs manquent à l'appel

Publié le : - Auteur : La Vie Eco

Sur les 78 527 transactions portant sur un montant total de 104,5 MDH effectuées sur les 70 sites nationaux en 2009, 93%  ont été conclus avec des cartes marocaines.
«Le nombre des opérations réalisées par ce moyen de paiement est encore limité, mais la preuve électronique est bel et bien une réalité juridique au Maroc», explique Me Abdelali Quessar, avocat au barreau de Casablanca.
Ce mode de transaction est régi par une loi qui était en gestation depuis la fin des années 90 déjà et qui n’a vu le jour qu’en novembre 2007 (dahir 1-07-129). Portant le numéro 53/05, la loi relative à l’échange électronique de données juridiques est venue modifier et compléter les dispositions des articles 417, 425, 426, 440 et 443 du dahir formant Code des obligations et des contrats.
Que dit cette loi ? Tout simplement que l’écrit sur support électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier. Elle détermine ensuite les conditions de sa recevabilité devant les différentes instances et définit la manière dont doivent se passer ces actes, les conditions nécessaires à leur validité et les moyens techniques de les réaliser.
Les modalités de production, de sécurisation et de certification de la signature électronique sont également précisées, de même que la manière d’offrir un produit, un service ou une prestation ainsi que les obligations des vendeurs et des acheteurs.
L’Anrt joue le rôle d’autorité nationale d’agrément et de surveillance
Mais cette loi est-elle aujourd’hui applicable aux grosses transactions entre entités morales ? Pas encore en fait. Selon Mohamed Benmajdoub, conseiller du ministre de l’industrie, du commerce et des nouvelles technologies, il y a deux niveaux de sécurité dans toute transaction.
Par exemple, l’acte d’acheter un livre ou un billet d’avion requiert une certification et une authentification des actes tant du côté du cyber marchand que du consommateur. Concrètement, le client doit avoir des garanties de l’existence du commerçant tout comme le commerçant, lui, a besoin de s’assurer que sa prestation sera payée.
C’est le premier niveau de sécurité assurée par les plateformes de paiement en ligne, la plus sollicitée étant Maroc Télécommerce. Dans les opérations courantes qui passent par ce que l’on appelle un Terminal de paiement électronique (TPE), c’est le Centre monétique interbancaire (CMI), explique Mme Rachida Benabdellah, qui en est le Dg, qui prend en charge la sécurité financière de toute transaction qu’il enregistre.
Mais, pour la partie contractuelle, il faut continuer à se référer à la facture. Ainsi, si un achat est effectué en ligne auprès d’une grande surface, c’est la facture en support papier qui sera exigée par le vendeur pour échanger, remplacer ou réparer tout produit défectueux.
Pour le reste, il y a les sites marchands par lesquels s’effectuent les opérations qui ont la responsabilité de garder les traces de tout ce qui s’effectue par leur biais, selon les modalités fixées par la loi ou ses décrets d’application. Quant au second niveau de sécurité, il concerne les engagements qui ne peuvent être pris que sur la base d’un certificat électronique, l’équivalent d’un cachet de l’entreprise et de la signature de délégataires.
C’est là qu’interviennent, comme le prévoit la loi, des prestataires de service autorisés pour délivrer ce genre de certificat qui garantit l’identité de la société, les indications sur la qualité du signataire, les modalités comme les montants sur lesquels les mandataires peuvent s’engager.
Tout cela pour préserver à toutes les parties les garanties comme les modalités de recours en cas de litige, dans les mêmes conditions de la signature d’un contrat légalisé ou notarié, par exemple. A savoir aussi que ces prestataires de services doivent répondre à des conditions techniques et humaines pour être agréés en tant que tels.
Azzeddine Mountassir Billah, Dg de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT), explique: «La loi mentionne explicitement ce qu’elle appelle une autorité nationale d’agrément et de surveillance de la certification qui doit agréer des prestataires chargés de délivrer les certificats».
Cette autorité n’est autre que l’Anrt. Aujourd’hui, aucun prestataire n’est encore désigné, mais Poste Maroc sera sans aucun doute le premier organisme à avoir un agrément. Me Abdelali Quessar tient toutefois à rappeler le principe de droit fondamental : «La loi sur l’échange électronique est une grande avancée que nécessitait la dématérialisation en matière d’échange et de paiement.
Mais, attention ! cette nouvelle loi ne peut ni remplacer ni être opposée aux textes spécifiques comme le code de l’immobilier. Ce qui fait qu’un certain nombre de secteurs ne peuvent faire l’économie des transactions habituelles qui doivent passer par un support papier ou un notaire».
Complémentarités :Deux textes pour achever le dispositif

La loi sur la preuve électronique ne doit pas être prise de manière isolée. En effet, expliquent les juristes, elle doit être revisitée à travers deux autres textes. Le premier est la loi 09/08 sur la protection des données personnelles. Elle est déjà promulguée, mais on attend encore la constitution de la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP) dont le décret a été publié au Bulletin officiel du 18 juin 2009. Cette loi prévoit notamment les modalités de l’utilisation des données personnelles et détermine les moyens dont dispose le consommateur pour se protéger contre les abus possibles et notamment son droit de ne pas être harcelé par des annonceurs ou une utilisation illégale des informations le concernant. Elle donne à la CNDP un délai de deux ans après son installation pour qu’elle se mette à niveau avant de pouvoir fonctionner correctement. Le second texte, encore en préparation, est la loi sur la protection des consommateurs qui viendra mettre en place des garde-fous supplémentaires.
Par Mohamed El Maâroufi
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