Cinq années se sont écoulées depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code de la famille. Difficile de dresser un bilan en n’ayant pas assez de recul comme le souligne la juriste Malika Benradi. «Il n’est pas facile, objectivement et scientifiquement, d’évaluer le nouveau Code de la famille en 5 ans d’application ( …) le changement étant lent, il ne peut être véritablement apprécié que sur une décennie, voire une génération». Cela dit, le Code de la famille constitue un progrès dans l’égalité entre l’homme et la femme. «La réforme du texte de la Moudawana a été un géant pas entrepris dans le sens de la consécration des droits de la femme et de l’homme sur le même pied d’égalité», affirme Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique des droits de la femme. D’importantes réformes y ont été introduites. Et pour preuve, le nouveau code porte l’âge du mariage des filles de 15 à 18 ans, établit le droit du divorce par consentement mutuel. Le Code de la famille livre une nouvelle vision des rapports conjugaux basée sur la responsabilité partagée du couple au sein de la famille. Ce texte consacre pour la première fois l’égalité au niveau de la responsabilité familiale et au niveau des droits et des devoirs des deux époux. Il protège également le droit des enfants et intègre les accords internationaux relatifs aux droits de l’enfant auxquels le Maroc a souscrit.
Malgré ces progrès, de nombreuses lacunes subsistent.
Si la polygamie est soumise à l’autorisation du juge et à des conditions légales draconiennes qui la rendent presque impossible, il est navrant de constater que celle-ci persiste. Il en va de même pour les mariages des mineures qui continuent de prendre de l’ampleur. «On constate que les demandes pour le mariage des mineures, au lieu de baisser, sont en constante progression. Le mariage des mineures doit être l’exception et non pas la règle», note Mme Assouli. Ces autorisations risquent de compromettre la réforme du Code de la famille. Au-delà du Code de la famille, la levée par le Royaume des réserves de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme constitue une avancée de taille et prouve que le Maroc est sur la bonne voie de l’Etat de droit.«C’est une grande avancée, mais pour être concrète, il faut s’atteler à un travail important d’harmonisation de tout l’arsenal juridique marocain avec la CEDAW sur la base du respect du principe de non-discrimination basée sur le sexe», note Mme Benradi. La levée des réserves ouvrira la voie à de nouvelles réformes. Mais jusqu’où le Maroc pourra-t-il aller dans la levée de ces réserves, et donc dans l’instauration de l’égalité entre hommes et femmes dans la mesure où la convention des Nations unies exclut toute forme de discrimination ? Pour la juriste, Malika Benradi, tout dépendra de la volonté politique. «Les adversaires de l’égalité doivent être convaincues que les femmes constituent les vecteurs du changement et sans l’amélioration de leur condition, aucune démocratisation, aucun développement durable, et aucun respect des droits humains ne sont possibles», conclut elle. Même si les mentalités commencent à changer au Maroc, de nombreuses résistances à l’émancipation de la femme se font encore ressentir.