Rares ont été les occasions où tous les intervenants dans l’acte de bâtir (promoteurs, architectes, ingénieurs topographes, bureaux d’étude et entreprises du BTP) ont fait preuve d’une telle solidarité. Cette fois-ci, c’est pour faire bloc contre l’application de la loi n° 66-12 relative au contrôle des irrégularités dans le domaine de l’urbanisme et de la construction. «Toute la profession s’accorde sur le fait que ce texte est complètement en déphasage avec les réalités du secteur», explique Youssef Iben Mansour, président de la Fédération nationale de la promotion immobilière (FNPI). Ce dernier a conduit la sortie médiatique menée vendredi 25 novembre dernier par les professionnels de la construction et du BTP, dans une ambiance électrique, en marge du Salon international du bâtiment (SIB). Mais de quoi ont-ils peur, au fait? Les griefs des opérateurs se résument en trois points majeurs. D’abord, leur non implication dans la concertation et la préparation de la loi. C’est le premier argument souvent brandi lorsqu’une loi dérange. Ensuite, viennent les incohérences relevées avec des textes existants, ainsi que les réalités de son application sur le terrain. Sur ce dernier volet, justement, la loi durcit le contrôle, bétonne les procédures d’ouverture et de fermeture de chantiers et renforce «le caractère coercitif des sanctions, notamment par la révision à la hausse des amendes et l’institution de sanctions privatives de liberté en cas de récidive», précise la FNPI.
L’attention des professionnels se porte surtout sur les articles 65, 66 et 67 qui ont trait aux contrôles et sanctions. La question occupe les deux tiers de la note de contestation des professionnels. La nouvelle loi stipule en effet que ce contrôle devrait se faire par des agents de la police judiciaire ou des auxiliaires de la wilaya, de la préfecture et de l’administration, habilités à cet effet. Le rôle, les responsabilités et le champ d’intervention de ces agents seront fixés ultérieurement par un texte réglementaire sous forme de décret. Pour les opérateurs, «ce vide juridique ouvre la voie à des abus de pouvoir de la part des auxiliaires de l’autorité locale». L’auxiliaire de l’autorité pourrait décider de l’arrêt immédiat du chantier à la constatation d’infractions. «Un abus de la part des agents constituerait une réelle menace sur le chantier et la vie du projet: arrêt de chantier, procédures judiciaires et administratives pour débloquer la situation, pour récupérer les biens et machines… Le secteur joue la résistance.
Voies de recours
Encore sous le choc de la nouvelle loi, les professionnels n’ont pas encore arrêté un plan de riposte. Ils réfléchissent tout de même sur la mise en place d’un comité interprofessionnel pour saisir l’administration et travailler sur les amendements des décrets d’application du texte. Par ailleurs, les failles relevées portent aussi sur la commercialisation et l’harmonisation de la loi avec d’autres textes. Par exemple, le promoteur peut commercialiser les lots de terrains avant l’obtention de la réception provisoire. «C’est-à-dire, implicitement, qu’il faudrait que les lots de terrains passent dans le cadre de la Vefa, ce qui est contradictoire». Enfin, l’article 55, également contesté, serait en contradiction avec la nouvelle obligation incombant au président du conseil communal de se limiter à l’attestation de l’architecte dans le cas où ce dernier serait chargé du projet.
Par Safall FALL
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