France : Responsabilité de l'Etat pour faute lourde du service public de la Justice, l'accueil des victimes par ricochet

France : Responsabilité de l'Etat pour faute lourde du service public de la Justice, l'accueil des victimes par ricochet

Publié le : - Auteur : 2LR

Les victimes par ricochet des fautes lourdes du service public de la justice sont recevables en leur demande en réparation de leur préjudice, et ce alors même qu’elles ne sont pas des utilisatrices de ce service. C’est ce que décide la 1re chambre civile de la Cour de cassation dans deux arrêts du même jour, dont l’importance est marquée par la rédaction de deux rapports correspondants.
Dans une première espèce, il s’agissait du suicide d’un détenu placé en détention provisoire, dont il est rapporté que la cause en est la faute lourde du juge d’instruction chargé de son dossier. Sa veuve, en son nom personnel et en représentation de sa fille et de ses beaux-parents, assigne l’Etat en réparation de leur préjudice. La 1re chambre civile statue ce jour après cassation avec renvoi (Cass. 1re civ., 14 mars 2006, n° 04-15.458, Lamyline). Le Trésor public a été condamné à réparer le préjudice des demandeurs, subi en leur qualité d’héritiers du défunt, mais leur demande de réparation de leur préjudice personnel est déclarée irrecevable, dans la mesure où ils ne sont pas des usagers du service public de la justice. La Cour de cassation casse et annule cette décision en invoquant « un dommage par ricochet causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice » (Cass. 1re civ., 16 avril 2008, n° 07-16.286).
Dans une deuxième espèce, un jeune homme est mis en examen pour le chef de complicité de vol à main armée ; il est placé en détention provisoire puis libéré sous contrôle judiciaire. Par la suite, un arrêt de cour d’assises le déclare non coupable. Il demande donc, avec ses parents, réparation en justice de son préjudice causé par une faute des services judiciaires. La cour d’appel déclare les parents du demandeur irrecevables en leur demande, au motif qu’ils n’étaient pas partie à la procédure diligentée contre leur fils et n’ont pas souffert personnellement de la faute rapportée. La Cour de cassation casse et annule cet arrêt dans la mesure où « les époux X invoquaient un dommage par ricochet causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice« .
Par ces deux décisions, le Cour élargit le cercle des victimes de dysfonctionnement de la Justice susceptibles d’obtenir réparation. La preuve d’un préjudice personnel et direct suffit pour cela, et ce alors même que la victime n’est pas utilisatrice du service public de la Justice.
Cass. 1re civ., 16 avril 2008, n° 07-16.504
Cass. 1re civ., 16 avril 2008, n° 07-16.286

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