Ministère de la Justice : Des lois annoncées, des retards accusés

Ministère de la Justice : Des lois annoncées, des retards accusés

Publié le : - Auteur : Media24

Le ministère de la Justice est attendu sur plusieurs textes stratégiques qui tardent à voir le jour. Détails.

On annonçait féconde l’année législative du ministère de la Justice. C’est finalement un démarrage timoré que connait 2021 pour le département de Mohamed Benabdelkader, oscillant entre blocages et tergiversations sur des textes souvent fondateurs. Médias24 a essayé de joindre le ministre et un membre de son cabinet pour avoir des explications, sans succès. Tour d’horizon.

Exception d’inconstitutionnalité, un texte qui fait peur ?

Sous son appellation torturée, l’exception d’inconstitutionnalité recèle un mécanisme qui révolutionnera le quotidien des justiciables. Pour simplifier : Il leur permettra de soulever, durant un procès en cours, le caractère inconstitutionnel d’une disposition dont dépend l’affaire et de porter la question devant la Cour constitutionnelle.

Pour désigner ce projet de loi organique, le mot révolutionnaire n’est pas risqué. Est-ce justement la raison qui explique les atermoiements du ministère de la Justice ?

Le texte a été adopté par le Parlement en 2018. S’en est suivi une censure partielle de la Cour constitutionnelle qui aura pour effet de suspendre sa promulgation. Depuis, le projet est en stand by. Dès 2019, une version arrimée aux observations des sages est validée en conseil des ministres et depuis, rien à signaler.

Organisation judiciaire, parcours similaire

Ce texte justifie d’un parcours similaire à celui de l’exception d’inconstitutionnalité, à cette nuance qu’il s’agit d’une loi. Ce qui n’en retire pas l’importance, avérée, puisqu’il s’agit de revoir l’organisation juridictionnelle du Royaume en tenant compte de l’émergence, sur le papier, de la Justice en tant que pouvoir indépendant.

Validé au Parlement à la fin 2018, ce texte a vu quelques unes de ses dispositions invalidées par la Cour constitutionnelle. Ce qui empêche à ce jour sa promulgation par le Chef de l’Etat. La décision de la Cour remonte à début 2019. Depuis lors, parlementaires et sphère judiciaires sont en attente d’une nouvelle mouture qui tarde à venir.

Evoqué par les sages, un des enjeux centraux de la future organisation touche à la distinction entre les affaires judiciaires et administratives au sein des juridictions. Sans en dévoiler le contenu, le ministre annonce la finalisation d’une mouture en conformité avec les observations de la Cour constitutionnelle. La nouvelle version est d’ores et déjà critiquée par les organes intéressés, notamment la présidence du ministère public qui en pointe les incohérences dans son dernier rapport.

Dématérialisation des procédures, effets d’annonces

Annoncée en grand pompe en mai 2020, le texte sur l’utilisation des moyens électroniques dans les procédures civile et pénale a été rapidement court-circuité par l’Association des barreaux du Maroc, qui avait réclamé un délai pour examiner ce projet novateur. Une année plus tard, aucune nouvelle.

En annonçant l’élaboration du texte, le ministre de la Justice avait pourtant promis son introduction diligente au circuit législatif. Survenu au plus fort de la pandémie et, donc, au moment où les juridictions étaient quasi-fermées, le contexte de sa présentation s’y prêtait. Aujourd’hui, les sorties du ministre évoquent ici et à là la stratégie de numérisation de la Justice, mais sans fixer un horizon à l’adoption du texte qui en fournira la base légale.

Code pénale, code de procédure pénale

La réforme pénale est-elle devenue une chimère ? 8 ans après la publication de la charte pour la réforme du système judiciaire, un de ses volets majeurs est aujourd’hui dans le flou. Aux yeux de l’opinion, difficile d’entrevoir une sortie eu égard aux explications évasives autour de ce retard.

Le projet de loi modifiant le code pénal bloque toujours à la Chambre des représentants. Interpellés, des partis au sein même de la majorité se renvoient la responsabilité du blocage. « Le projet bloque du coté de l’USFP et de leur ministre », lance un membre de la commission de la Justice.

Pour sa part, M. Benabdelkader ne s’en cache pas : Il n’est pas satisfait de la mouture déposée en 2016 par Mustapha Ramid, à l’époque ministre de la Justice, présentée comme partielle et peu ambitieuse. Sauf que son homologue actuel n’annonce aucune alternative et met vaguement l’accent sur « la nécessité d’ouvrir un débat », notamment sur la question des libertés individuelles.

Quid du code de procédure pénale ? Eclipsé par son pendant le code pénal, ce texte non moins stratégique demeure encore au stade d’avant-projet. Depuis des années, il fait l’objet d’annonces sporadiques vantant ses apports. Depuis 2018, le ministère a constamment promis son dépôt imminent devant le Conseil du gouvernement. Promesse constamment non tenue.

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