La société civile professionnelle d'avocats

La société civile professionnelle d'avocats

Publié le : - Auteur : nbzineb.com

La profession d’avocat au Maroc a connu une réforme par le biais de deux lois, n° 28.08 et 29.08, dahirs n° 1.08.101 et 1.08.102 du 20 octobre 2008.
Tandis que la première de ces lois a réformé les dispositions existantes concernant le statut de l’avocat, la seconde a permis, pour la première fois, aux avocats marocains de se réunir sous la forme d’une société.
Cette réforme tant attendue et qui est censée permettre au Maroc de rattraper un retard par rapport à d’autres pays où mêmes les formes sociales commerciales peuvent accueillir l’activité de l’avocat, s’est avérée moins audacieuse qu’elle n’aurait pu l’être.
Seule une forme sociale a été retenue par cette réforme. Il s’agit de la société civile professionnelle. C’est une forme destinée aux professions libérales et aux officiers ministériels afin de leur permettre l’exercice collectif d’une profession commune aux associés.
Des avocats souhaitant se réunir sous la forme d’une société peuvent donc adopter cette seule forme et, qui plus est, doivent être inscrits auprès du même barreau. Exit donc la possibilité de voir des investisseurs associés d’une SCP. Néanmoins,  une SCP pourra être associée d’une autre SCP.
Cette société aura évidemment la personnalité morale et sera inscrite au tableau de l’ordre dans le ressort duquel se situe son siège social. La dénomination doit figurer sur toutes les correspondances et tous les documents, suivi de « SCP  d’avocats ». Elle accompagne les noms des avocats associés au tableau.
Sa dénomination peut être constituée des noms de tous les associés, de l’un ou de plusieurs d’entre eux. Si le nom de tous les associés ne figure pas, la dénomination doit être suivie de la mention « et associés ». La société peut garder comme dénomination le nom d’un ancien associé tant qu’il est suivi par la mention « anciennement » et qu’au moins un des actuels associés l’ait été pendant que cette personne exerçait dans la société. La dénomination doit être toujours précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle d’avocats ».
La loi prévoit la procédure de création de la SCP, qui se fait auprès de l’ordre. Cette procédure est applicable que ce soit pour créer une SCP suite à un accord entre plusieurs associés souhaitant travailler en commun dans le cadre d’une société, ou par fusion ou  scission. Cette même procédure est également applicable dans le cas de modification des statuts.
Une demande signée par tous les associés doit être déposée auprès du bâtonnier, accompagnée d’une copie de l’acte de constitution et des statuts.
La demande est transmise au conseil de l’ordre qui doit prendre sa décision dans les deux mois de la réception du dossier et en cas de silence au-delà de ce délai, la demande est considérée acceptée. Le refus du dossier sera motivé par le non respect des textes législatifs et réglementaires par les statuts. Un recours est possible contre la décision du Conseil devant la Cour d’appel.
La décision est dans tous les cas adressée aux associés et au procureur du Roi.
Les avocats associés doivent veiller à ne pas défendre des parties ayant des intérêts contraires dans le cadre d’une affaire. Ils ne doivent pas non plus exercer dans une autre société que celle où ils sont associés.
On devient associé d’une SCP d’avocats en faisant un apport. Les parts sont constituées de :
– Droits matériels et immatériels;
– Documents et archives et toutes autres choses prêt à une utilisation professionnelle;
-Des sommes monétaires.
Les parts sont  attribuées en propriété ou en usufruit. La libération des apports doit faite entièrement lors de la constitution de la société.
Le travail des associés dans le cadre de la SCP ne peut être qualifié d’apport. Il n’y a donc pas d’apport en industrie.
Les apports en numéraire ainsi que l’équivalent monétaire des autres formes d’apports constituent le capital qui se est divisé en parts égales attribuées aux associés.
Une fois la société constituée, il convient évidemment de respecter  les obligations de publication qui consistent en une inscription dans un registre spécial auprès de l’ordre des avocats qui conserve un dossier pour chaque société. Cette formalité permet l’opposabilité aux tiers.
Toute personne qui y a  intérêt peut obtenir, à ses frais, un extrait des statuts comportant certaines mentions limitativement énumérées par l’article 15 de la loi.
Une fois la société constituée, son fonctionnement doit respecter les statuts, qui désignent les conditions de nomination des gérants et de leur éviction, leurs pouvoirs, la durée de leur mandat … Néanmoins, il n’est pas précisé si ce gérant doit être un avocat associé ou non.
Quant aux associés, la loi prévoit que leurs fautes peuvent engendrer leur responsabilité personnelle vis-à-vis de la société et des autres associés et qu’envers les tiers, la société est tenue responsable des fautes des associés.
Les associés ne sont tenus aux dettes qu’à hauteur de leurs parts dans la société. Néanmoins, les tiers ne peuvent tenir les autres associés pour ce qui résulte  de la faute de l’un d’entre eux.
La loi réglemente les assemblées générales : une AGO par an au moins, puis les autres sur demande la moitié au moins des associés. Les conditions de convocations sont prévues dans les statuts. Les décisions sont prises à la majorité (sauf disposition spéciale des statuts) et sont celles qui dépassent les pouvoirs des dirigeants et elles consignées dans des PV signé par les associés présents. Ce PV doit comporter certaines mentions prévues à l’article 19 de la loi qui prévoit également un formalisme particulier.
Les statuts ne peuvent être modifiés qu’à la majorité des trois quarts des voix de tous les associés. Néanmoins, l’augmentation des obligations des associés nécessité l’unanimité.
Le quorum est des trois quarts des associés, présents ou représentés. Une deuxième convocation est possible en cas d’insuffisance. Dans ce cas, le minimum requis est de deux associés détenant au moins le tiers des parts.
Chaque associé ne peut pas avoir plus de la moitié des parts.
En raison des conditions nécessaires pour avoir la qualité d’associé, les parts ne peuvent faire l’objet d’une vente aux enchères ni d’un gage. Les parts ne peuvent être cédées qu’à la société, un des associé ou un avocat. Néanmoins, dans ce dernier cas, l’accord de la société est nécessaire. Le cédant communique à la société et à tous les associés le projet de cession par LRAR. Dans les deux mois de la réception, la société doit émettre son avis sur le projet de cession, le silence valant acceptation. Le refus oblige la société à faire une offre d’achat des parts par elle-même, par un associé ou un avocat tiers au même prix contenu dans le projet, dans les six mois du refus, le silence valant là aussi acceptation du projet.
La même procédure est applicable lorsqu’un associé souhaite se retirer de la société.
L’avocat qui perd cette qualité a six mois pour céder ses parts selon la même procédure. Le retrait peut être obligatoire lorsqu’une condamnation irrévocable de suspension pour un délai d’au moins trois mois est  intervenue. Cette décision nécessité l’unanimité des autres associés. En l’absence du retrait, l’associé garde cette qualité avec les obligations et droits qui endécoulent, sans qu’il ne puisse avoir droit aux bénéfices. Il ne eput ni exercer une activité professionnelle, ni gérer une société.
Sauf en cas de cession, l’intégration d’un nouvel associé entraîne l’augmentation du capital. L’augmentation peut résullter également de la création de parts nouvelles.
La durée de vie de la société peut être allongée, ce qui s’analyse en une modification du statut.
Les règles de déontologie et de discipline de l’avocat s’appliquent à la société, qui doit également contracter une assurance sur sa responsabilité professionnelle.
En cas de décès d’un associé, la société informe les héritiers de la nécessité d’entamer la procédure de cession dans l’année qui suit la réception de la notifiication. La procédure de cession d’applique également dans ce cas. Si le délai expire sans que les associés ne présentent de projet, celui qui leur est soumis par la société et homologué par le bâtonnier s’impose aux héritiers.
Les comptes annuels font l’objet de l’accord de l’assemblée générale dans les trois mois de la fin de l’année comptable et sont mis à disposition des associés 15 jours avant l’assemblée générale au siège de la société.
Il ne faut pas perdre de vue que, dans le respect des dispositions évoquées et de la réglementation de la profession d’avocat, la SCP étant une société, elle est soumise par là aux dispositions de droit commun concernant les sociétés et qu’en l’absence d’une règle spéciale le recours aux règles de droit commun est possible (sociétés civiles et sociétés en général).
La loi prévoit également la liquidation, la nullité et la dissolution (volontaire ou radiation, décès ou retrait de tous les associés) de la société.

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