Le gouvernement va-t-il tenir ses engagements sur le plan législatif ? Plusieurs textes se font encore attendre alors qu’il ne reste plus qu’un an et demi pour la fin de cette législature. Les décrets d’application de plusieurs lois publiées, depuis des années, au bulletin officiel ne sont pas encore édités. Le gouvernement compte bientôt s’attaquer à ce dossier.
Le tiers des législations adoptées par le Parlement restent sans décrets d’application pendant une durée dépassant un an. Le gouvernement est appelé à rectifier le tir durant cette législature. Interpellé sur cette question à la Chambre des conseillers, le ministre d’État chargé des Droits de l’homme et des relations avec le Parlement, Mostafa Ramid, souligne que le chef du gouvernement a déjà donné ses instructions afin de concrétiser tous les engagements gouvernementaux en matière de textes réglementaires et d’application. Il s’agit d’un pari difficile à tenir compte tenu du retard abyssal accusé dans ce domaine. Plusieurs dispositions juridiques restent lettres mortes à cause de la non publication des textes d’application. Les parlementaires citent, entre autres, la loi sur les libertés des prix et de la concurrence dont 13 textes d’application ne sont pas encore publiés, la loi 67-15 relatives aux hydrocarbures, la loi 23-13 relative à la protection de la propriété industrielle…
Des garanties s’imposent
D’aucuns soulignent qu’il s’avère indispensable de garantir l’effectivité des lois pour accroître la crédibilité de l’action publique. La lenteur dans la mise en œuvre de l’arsenal juridique a en effet un impact négatif sur le plan économique et social. Rappelons à cet égard que le Conseil économique, social et environnemental a déjà prôné la nécessité de mettre en place des mécanismes institutionnels et procéduraux pour permettre aux députés d’assurer le suivi de l’application des lois qu’ils ont votées.
À l’issue d’un délai de six mois par exemple suivant l’entrée en vigueur d’une loi dont la mise en œuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire, un rapport sur la mise en application de cette loi doit être présenté à la commission compétente.
Ce rapport dresse le bilan des textes réglementaires publiés et des circulaires édictées pour la mise en œuvre de ladite loi ainsi que de ses dispositions qui n’auraient pas fait l’objet des textes d’application nécessaires. Il peut donner lieu, en séance publique, à un débat ou à une séance de questions. À cela s’ajoute l’impératif de veiller à ce que les lois, tout en s’alimentant des standards et des meilleures pratiques internationales, soient adaptées à la réalité marocaine et soient élaborées dans le cadre d’une approche participative pour une application pleine et effective.
Expériences internationales
Le Maroc n’est pas le seul pays concerné par cette problématique. Plusieurs parlements ont érigé l’évaluation de l’implémentation des lois en priorité au même titre que la mission de législation en vue de rectifier le tir, le cas échéant dans des délais raisonnables.
Au Maroc, l’institution législative a commencé à peine, il y a quelques années, à s’intéresser à cette question qui mérite d’être prise en compte dans l’action parlementaire. Il s’agit non seulement de passer au peigne fin l’effectivité des lois mais aussi d’évaluer leur impact sur la société. Cette mission ne doit pas être considérée comme un luxe mais une exigence qui doit faire partie des attributions des parlementaires. Il faut dire que l’implémentation de la législation, dans les quatre coins du globe, est complexe et ne se fait pas toujours automatiquement comme on pourrait le penser.
Au Royaume-Uni, à titre d’exemple, le gouvernement est tenu de répondre au rapport qui lui est transmis par le Parlement dans un délai ne dépassant pas deux mois. L’Exécutif édite aussi des mémorandums détaillés sur la mise en œuvre de chaque loi, trois ans après son adoption. Selon les experts, il est préférable de procéder au contrôle trois ans après la mise en vigueur des lois. L’analyse de la perception de la loi par les différentes parties, dont la justice, s’impose.
Par ailleurs, le gouvernement est appelé à tenir ses engagements en matière législative en soumettant au Parlement les projets de loi qui se font toujours attendre. Il s’agit notamment de la révision du projet de loi organique sur le droit de grève qui est bloqué à la Chambre des représentants depuis 2016, du projet de réforme du Code du travail qui est décrié et redouté par les partenaires sociaux, du projet de loi portant sur les syndicats, du texte sur l’administration électronique…