PAR BASSAMAT FASSI FIHRI, avocat au barreau de Casablanca. Ce projet de loi passe ce mardi en commission parlementaire pour amendements et adoption. Son article 14 remet en cause un acquis: produire des documents rédigés en langues étrangères.
Le projet de la loi relatif à l’organisation judiciaire sera débattu à la Commission Justice et Législation de la première chambre ce mardi 6 juillet dans l’après-midi.
Apparemment, le ministère met la pression pour passer le texte avant la clôture de la session parlementaire en cours, donc avant le 15 juillet. Il veut le faire adopter avant les élections.
La rédaction de l’article 14 est toujours extrêmement critiquable.
En effet, ce texte remet en cause l’un des principaux acquis des justiciables depuis l’indépendance : le droit à la production, devant les juridictions, de documents rédigés dans une langue autre que la langue officielle du Royaume.
Or l’article 14 prévoit que les documents produits dans une langue autre que l’arabe doivent être traduits en langue arabe, à moins que la juridiction saisie en décide autrement.
Le suivi du parcours de ce texte depuis sa première version en 2016, reflète que les députés semblaient sensibles à la gravité d’une telle disposition sur le système judiciaire national et sur le droit d’accès à la justice. En effet, la version initiale de cet article ne prévoyait pas la possibilité, pour les juridictions, d’exiger la traduction. Le projet de ce texte, tel qu’il a été adopté par la première chambre en 2016, a été modifié par les conseillers.
Toutefois, la technicité a trahi les rédacteurs de la proposition de l’amendement. Au lieu de prévoir une formulation selon laquelle les documents établis en langue étrangère seront admis à moins que le tribunal n’en exige la traduction, ils ont considéré que la nécessité de la traduction est un principe auquel on ne peut déroger que sur décision de la juridiction saisie.
Une telle formulation dénote non seulement du manque de professionnalisme des rédacteurs mais également de l’aberration législative et ne manquera pas de poser de nombreuses difficultés.
En effet, un justiciable qui produit un document en langue étrangère peut produire la traduction officielle ou ne pas la produire.
Dans ce cas plusieurs hypothèses sont envisageables :
Il est pour le moins paradoxal que le Bulletin officiel et les journaux d’annonces légales, les états de synthèse et de nombreux documents administratifs soient publiés et édités en langue française et que soudainement l’exigence de la traduction devienne une priorité absolue.
Pourquoi former des magistrats en intégrant dans leur cursus l’enseignement des langues, si par ailleurs cet enseignement devient inutile dans leur pratique quotidienne?
La traduction des pièces doit demeurer une faculté et non un règle impérative.
C’est ainsi que le texte doit être rédigé: « les documents doivent être traduits si le juge le décide« .
Nous devons proposer la modification du paragraphe 2 de l’article 14 du projet :
» يتعين تقديم المقالات و المذكرات و العرائض للمحكمة باللغة العربية. و يمكن الإدلاء أمام المحكمة بالوثائق و المستندات و غيرها من وسائل الإثبات بأي لغة أخرى، ما لم تقرر المحكمة ضرورة الإدلاء بترجمتها للغة العربية مصادق على صحتها من قبل ترجمان محلف. كما يمكن للمحكمة و لأطراف النزاع أو الشهود الاستعانة أثناء الجلسات بترجمان محلف تعينه المحكمة أو تكلف شخصا بالترجمة بعد أن يؤدي اليمين أمامها «
Voici la rédaction actuelle de l’article 14 du projet :
» تظل اللغة العربية لغة التقاضي و المرافعات و صياغة الأحكام القضائية أمام المحاكم، مع تفعيل الطابع الرسمي للأمازيغية طبقا لأحكام المادة 30 من القانون التنظيمي رقم 26.16 المتعلق بتحديد مراحل تفعيل الطابع الرسمي للأمازيغية و كيفيات إدماجها في مجال التعليم و في مجالات الحياة العامة ذات الأولوية.
تقدم الوثائق و المستندات للمحكمة باللغة العربية أو بلغة أجنبية مصحوبة بترجمتها لهذه اللغة مصادق على صحتها من قبل ترجمان محلف، ما لم تقرر المحكمة خلاف ذلك، كما يمكن للمحكمة و لأطراف النزاع أو الشهود الاستعانة أثناء الجلسات بترجمان محلف تعينه المحكمة أو تكلف شخصا بالترجمة بعد أن يؤدي اليمين أمامها «