Bank-Al Maghrib a récemment publié une série de neuf circulaires visant à compléter le dispositif pour encadrer le marché du crowdfunding au Maroc. De quoi donner de l’espoir aux acteurs de l’écosystème qui restent cependant sur leur faim, notamment, en ce qui concerne un certain nombre de détails techniques.
C’est peut-être le début de la fin d’une longue attente. Jusqu’ici dans l’expectative, les acteurs de l’écosystème naissant du crowdfunding commencent à voir le bout du tunnel. S’ils sont parvenus à émerger et ont fait preuve d’innovation et de créativité pour permettre le financement de projets d’entrepreneurs et d’associations, ils mènent au quotidien leurs activités en l’absence d’une loi réglementaire.
Tout porte à croire que cette précarité juridique ne sera plus qu’un souvenir. La réglementation du marché du crowdfunding a, en effet, franchi récemment une nouvelle étape juridique avec, notamment, la publication de neuf circulaires par Bank-Al Maghrib, qui viennent compléter le dispositif prévu pour encadrer ce mode de financement des jeunes pousses marocaines.
Une nouvelle bien accueillie…
Cet arsenal, venu parfaire l’adaptation du cadre réglementaire national du financement participatif, est accueilli avec un grand soulagement. «C’est un grand plaisir. Nous, parmi tant d’autres, on accompagne ce processus depuis bientôt huit ans. Ça fait plaisir de voir tous ces efforts collectifs porter leurs fruits», se réjouit Eric Asmar CEO de «Happy Smala», un lab d’innovation spécialisé en approches et en finance collaboratives. Le sentiment du patron de la plateforme, qui expérimente des approches collaboratives et des nouvelles technologies pour créer de l’innovation à fort impact depuis 2014, est partagé par Sarah Jaidi, une autre entrepreneuse fondatrice de Kiwi Collecte.
Le nouveau coup de pouce de BAM, qui vient s’ajouter à l’adoption en conseil des ministres en mai dernier du décret sur le financement partitif et dont le décret d’application se fait attendre, est une bonne nouvelle pour les plateformes de crowdfunding qui vont pouvoir commencer à concrétiser des choses sur le financement participatif, lequel est vu comme une grande promesse pour les entrepreneurs et les porteurs de projets, s’enthousiasme la jeune dame qui intervenait dans une émission télévisée d’une grande chaîne de la place.
Mais Eric Asmar, tout comme son co-débatteur du jour, Sarah Jaidi, s’il se dit ravi de l’arrivée des circulaires renforçant la loi n°15-18 relative au financement collaboratif, détaillant les modalités et les conditions à suivre par les gestionnaires des plateformes, les porteurs de projets et les contributeurs, reste encore sur sa faim.
«La publication des circulaires est une étape parmi tant d’autres. Il y a encore du chemin à faire à la fois du côté de Bank-Al Maghrib et de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC).
…Mais, il reste d’autres réglages à faire
Cela nous donne plus de clarté, mais il reste des questions auxquelles on n’a pas encore des réponses», soutient l’invité. En gros, poursuit-il, les circulaires nous donnent les grandes lignes sur les circuits d’agrément, mais le flou reste sur les questions d’ordre opérationnel, notamment les conditions d’entrer pour accélérer une plateforme, les interfaces entres les autres plateformes et les acteurs du marché, c’est-à-dire les établissements de paiement, les établissements de crédit… Le constat est le même ou presque pour Jaidi.
«Quelles sont les conditions qui seront mises en place pour qu’une plateforme se relie à une banque. Quelles sont les normes encadrant les prestations de paiement par carte bancaire ?», s’interroge-t-elle, entre autres questions. En attendant que toutes ces zones d’ombre soient levées d’ici la fin de l’année afin de protéger et développer le marché, signalons que le potentiel du crowdfunding reste encore faiblement exploité dans le Royaume, ce qui veut dire que ce mode de financement représente une énorme opportunité dans le pays pour les auto-entrepreneurs, les startups et les associations.
Faut-il le rappeler, l’accès au financement représente une des problématiques soulignées par les TPME en tant que barrière principale à leur création et développement, et ce, malgré leur poids dans le tissu économique et leur rôle moteur dans le développement. L’enjeu est donc capital pour les économies émergentes, notamment, africaines.
Plusieurs pays cherchent à rattraper leur retard sur ce marché plein d’avenir et de belles promesses. Pas très loin de chez nous, en Tunisie, les textes d’application relatifs au mécanisme de financement participatif seront publiés au cours des prochains jours, a fait savoir la directrice générale de promotion des petites et moyennes entreprises (PME) au ministère de l’industrie, des mines et de l’énergie, Malika Krit, pour appuyer les entreprises industrielles dans l’amélioration de leurs compétitivités et la réduction de leurs charges financières.
En cette période de relance, où le recours au financement bancaire est devenu très difficile, surtout pour les PME, TPE, startups. Ce mode de financement alternatif pourrait jouer un vrai rôle.