Comptables agréés/experts-comptables : La guéguerre se déplace au Parlement

Comptables agréés/experts-comptables : La guéguerre se déplace au Parlement

Publié le : - Auteur : L'Economiste

Le bras de fer entre expert-comptables et comptables agréés se dénouera au Parlement. Le projet de loi réglementant la profession de comptable agréé
et en particulier la création d’un ordre dédié est à la Chambre des représentants.
Les experts-comptables réunis en assemblée générale jeudi 20 mai à Casablanca s’y opposent fermement. « Il n’est pas concevable d’accorder un titre à quelqu’un simplement parce qu’il paye une taxe professionnelle», affirme Abdellatif Bernossi, président de l’Ordre des experts-comptables.
Deux ordres pour la même profession sont donc jugés inconcevables. «Nous faisons tous de la comptabilité. L’audit et le commissariat aux comptes représentent 20 à 30% de notre chiffre d’affaires», poursuit Bernossi pour lequel ce projet de texte accordera « un cadre légal à l’anarchie». Même s’ils s’en défendent, l’hostilité à la réglementation des comptables agréés s’explique en partie par une concurrence que les experts-comptables redoutent. Une petite minorité d’entre eux seulement pratique le commissariat aux comptes. Le reste de la profession étant beaucoup plus dans le conseil et la tenue de la comptabilité.
Vieux de plus de 10 ans, le débat entre experts-comptables et comptables agréés se poursuit mais cette fois-ci, il se déplacera au Parlement. Les premiers comme les comptables agréés ont démarré leurs campagnes de sensibilisation auprès des parlementaires. Dans ce qui semble être «un sursaut» de dernière minute, les experts-comptables, qui ont réussi jusque-là à bloquer toutes les tentatives des comptables agréés, misent sur leur capacité à amender le projet de loi actuellement au Parlement. Ils mettent surtout en avant le risque d’une remise en cause des efforts réalisés par le Maroc pour crédibiliser la profession sur le plan international et son image auprès des investisseurs. Ce serait même, selon eux, un pas en arrière au moment même ou l’on cherche à faire du Maroc un hub financier. Ils remettent ainsi en cause les conditions d’accès à la profession de comptable agréé fixées dans le projet de loi. « Ces conditions n’encouragent pas les études d’expertise comptable puisqu’il suffirait d’un bac + 3 et d’un stage pour pouvoir s’établir à son propre compte en tant que comptable agréé », soutient Bernossi qui reproche aux pouvoirs publics de «les avoir écartés des discussions».
L’idéal pour les experts comptables serait de lancer une «consultation générale» et une étude sur la profession pour déterminer les besoins en comptables agréés et en commissaires aux comptes. Ce qui suppose le retrait du projet du Parlement et le retour à la case de départ. Une sorte de tentative pour temporiser la décision, surtout que ce dossier s’est invité dans la campagne électorale, le renouvellement des membres du conseil national et des conseils régionaux est en effet prévu en novembre prochain.
Ce projet de loi, pour lequel les comptables agréés et la Fédération des associations des professionnels de la comptabilité ont bataillé, offre un cadre légal à la profession. Il crée, selon El Ghali Khadir, président de l’association des comptables agréés du Maroc (ACAM), « une vraie profession comptable au Maroc avec des prérogatives et des sanctions». Son avantage est qu’il «intègre tous les professionnels via les conditions dérogatoires. Ce qui évitera de semer la zizanie». L’on parle ainsi de près de 1.300 comptables agréés qui pourraient s’inscrire à l’Ordre.
Jusque-là, l’Acam estime avoir fait le nécessaire pour trouver un terrain d’entente avec les experts comptables. Mais ces derniers ont toujours rejeté leur proposition.
Rappelons qu’à un moment, il était question de créer deux compartiments à l’intérieur de l’Ordre des experts-comptables. Le premier devait regrouper les commissaires aux comptes qui garderaient le monopole de l’audit légal et le deuxième, celui des experts-comptables et les comptables agréés avec des passerelles entre les deux. «Nous ne sommes pas opposés au principe d’avoir une seule structure avec deux collèges. Mais aux conditions d’accès et transitoires prévus dans le texte. Sinon nous risquons de nous retrouver avec des personnes qui n’ont aucun diplôme et disposant d’une patente depuis 12 ans», soutient Bernossi.

Khadija MASMOUDI

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