Délai raisonnable, retraite, sanctions disciplinaires… un projet de loi organique entend introduire d’importants changements dans la gestion des carrières des magistrats. Tour d’horizon.
Adopté en Conseil des ministres, un texte modifiant la loi organique portant statut des magistrats va bientôt entamer son parcours au Parlement. Ces dispositions agissent essentiellement sur les carrières au sein de la magistrature, un corps érigé depuis 2011 en pouvoir indépendant.
Médias24 a consulté le projet et vous en livre les principaux apports.
C’est l’une des mesures phares du projet de refonte. Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ) pourra bientôt fixer des « délais indicatifs » pour le traitement des dossiers judiciaires. Cette mesure vise à remédier aux lenteurs à ce niveau.
Ces délais « indicatifs » seront établis selon la nature du dossier (civil, commercial, immobilier, etc.). Il ne concerneront que les cas pour lesquels le législateur n’a pas prévu de délais fixes.
De là, une nuance est à faire : cette règle sera utilisée essentiellement pour l’évaluation des performances des magistrats. De sorte qu’un dépassement du délai n’influera pas sur l’action judiciaire en elle-même ou sur les droits des parties.
Sous le régime actuel, le grade exceptionnel constitue le plafond en termes de carrière d’un magistrat. Or, cette limite est atteignable au bout de vingt ans de service.
La seule dérogation concerne le Premier président et le procureur général près la Cour de cassation, élevés au rang « hors grade ».
La moyenne d’âge pour l’accès à la magistrature est de 25 ans, ce qui signifie que la majeure partie des magistrats atteignent le grade exceptionnel à 45 ans.
Pour le reste des magistrats, le projet de loi propose ainsi d’introduire un nouveau grade, dit grade principal, qui sera supérieur au grade exceptionnel.
Aujourd’hui, l’âge de la retraite des magistrats est fixé à 65 ans. Cette limite d’âge peut être prorogée pour une période maximale d’une année renouvelable quatre fois, soit la possibilité pour un magistrat de siéger jusqu’à ses 70 ans.
Le projet propose de fixer cette limite à 75 ans, avec des prorogations maximales de deux ans renouvelables.
Cette mesure permettrait de court-circuiter les départs massifs de magistrats ayant atteint la limite de 70 ans, notamment au sein de la Cour de cassation.
Un magistrat qui subit une sanction disciplinaire peut, à l’expiration de certains délais, demander une réhabilitation.
Cette demande est valable après trois ans pour les sanctions de premier degré (blâme, avertissement, retard d’avancement, etc.), et après cinq ans pour les sanctions de deuxième degré (exclusion temporaire, rétrogradation, etc.).
Le projet de refonte pointe le fait que cette disposition rende obligatoire la réhabilitation à l’expiration des délais concernés. Ses auteurs voudraient y remédier en entourant ce mécanisme de conditions plus objectives.
Pour être réhabilité, l’intéressé ne doit pas commettre une nouvelle infraction professionnelle durant la période concernée. Aussi, les procédures d’évaluation doivent indiquer, chez le magistrat, une amélioration du comportement et du rendement.
Le projet de loi s’intéresse aux conditions d’accès à la magistrature par les fonctionnaires du CSPJ. Cette catégorie de candidats sera dispensée du concours sous réserve de certaines conditions. Le candidat doit appartenir au moins au grade classé à l’échelle n°11, et justifier d’au moins dix années de service public effectif dans le domaine des affaires juridiques.
Cette dispense ne bénéficie qu’aux prétendants âgés de 55 ans au maximum (au moment de soumettre la demande) et titulaires d’un doctorat en droit, en Charia ou d’un diplôme reconnu équivalent.
L’administration judiciaire concerne précisément les responsables judiciaires (premiers présidents des cours d’appel, président des tribunaux, procureurs généraux, etc.).
Ces derniers bénéficieront de formations en la matière. La refonte identifie précisément les organes chargés de piloter ces programmes. Il s’agit du CSPJ, du ministère de la Justice et de la présidence du ministère public.