Le débat sur le cadre légal des associations professionnelles, prévu lors de la 3e édition des Assises nationales des associations professionnelles (AP) au Maroc, qui se tiennent aujourd’hui à Casablanca, promet d’être animé. Le Programme d’appui aux associations professionnelles (PAAP) veut pousser plus loin les réformes. Il se présente avec une armada de propositions en espérant obtenir gain de cause, du moins pour une partie d’entre elles.
En 2004, le PAAP a fait appel au cabinet Masnaoui Mazars pour formuler les demandes des professionnels et des associations professionnelles. Premier constat: un cadre légal non adapté à la vocation économique des associations. Deuxième constat: une organisation interne généralement très fragile ou en cours de maturation pour les plus avancées. Enfin: un environnement externe peu favorable au développement du tissu associatif professionnel. Quatre ans après, la situation n’a pas évolué.
Dans le domaine juridique, l’associatif (en général) est régi par le dahir du 15 novembre 1958 plus précisément. Du coup, toutes les associations, ONG, syndicats patronaux et autres, aux domaines d’actions très différents, sont soumises à la même loi. Les associations professionnelles attendent alors, ou espèrent, un amendement de ce dahir. Il s’agit d’«insérer un titre spécifique permettant de les définir sur un plan légal et de leur attacher des règles leur assurant un fonctionnement transparent», lit-on sur le site du PAAP. «Il faut légitimer la particularité des associations professionnelles», confie Omar Oukrid, président du PAAP. Tous les experts semblent d’accord sur un amendement du texte. Les divergences apparaissent au niveau des priorités. «Je ne pense pas que le juridique soit une urgence, je suis plutôt pour une approche pragmatique; il reste beaucoup de travail à faire de la part des associations avant de s’attaquer aux lois», tempère Chakib Hafiani, expert-comptable et commissaire aux comptes au cabinet Baker Tilly. «L’attente d’un éventuel amendement de la législation ne doit pas être un alibi à l’inaction», ajoute Hafiani. Le législateur a apporté quelques modifications à cette loi en 2002. «Elles sont d’ordre sécuritaire», répond le professeur Rachid Lazrak, conseiller juridique et fiscal. Avant d’ajouter que «cela a été fait dans le but de contrôler les financements qui proviennent de l’étranger. Maintenant, il faut adapter les textes à la vocation des associations».
L’axe fiscal est aussi à l’ordre du jour. L’étude de 2004 propose une série de mesures pour encourager les associations professionnelles. Elles visent l’accroissement de leurs ressources grâce à la déductibilité à l’IS et à l’IR des dons en argent et en nature qu’elles reçoivent. La loi est claire sur ce sujet, seules les associations reconnues d’utilité publique peuvent bénéficier de cette déductibilité. Est-ce que la requête est réalisable? «Sûrement pas», répond une source à la direction des Impôts. Avant d’argumenter: «Je ne vois pas en quoi l’utilité publique est concernée dans le travail des associations professionnelles». L’étude propose aussi une réduction à 50% de la taxation des revenus patrimoniaux des associations professionnelles (fonciers, capitaux immobiliers). Selon Chakib Hafiani, cette mesure est plus importante et plus réalisable que le reste, «car cela permet aux associations d’avoir des revenus solides et pérennes». Elles espèrent obtenir aussi une imposition atténuée au taux forfaitaire et libératoire de 18% des rémunérations versées à leur personnel salarié ou occasionnel. Dans la législation actuelle, les associations sont soumises au droit commun. «La loi met les associations sur le même rang que les entreprises. Inutile de rappeler la différence entre les deux au niveau des moyens. Résultat: les associations recrutent selon leurs possibilités matérielles et négligent les compétences», martèle le directeur du PAAP.
Sur le volet financier, l’étude appelle à une accélération de la publication d’un plan comptable et son adaptation aux particularités des associations professionnelles. «Ce nouveau plan comptable a été présenté au Conseil du gouvernement, mais nous attendons toujours une circulaire du Premier ministre pour son officialisation; sur ce point, nous sommes optimistes car le gouvernement a montré à maintes reprises son désir de moderniser le tissu associatif marocain», précise Oukrid.
«Toutes les demandes qui sont formulées jusqu’à présent par ces associations ne les engagent en rien, cela aurait été plus facile si elles faisaient des efforts au niveau de la transparence», ajoute notre source à la direction des Impôts. La loi sur les contrôles externes des comptes des associations au Maroc s’intéresse à la nature des ressources des associations. La loi n’exige une certification que pour les associations qui reçoivent des fonds publics, et ces fonds doivent dépasser le seuil de 500.000 dirhams. Pour les fonds privés, aucun texte ne les oblige à rendre des comptes.
Reconnaissance d’utilité publique
– Être constituée conformément aux dispositions du dahir n° 1-58-376 du 3 Joumada I 1378 (5 novembre 1958);
– Disposer des ressources financières permettant d’accomplir notamment les missions d’intérêt général fixées par les statuts;
– Poursuivre des objectifs d’intérêt public au niveau local, régional ou national;
– Tenir une comptabilité permettant l’établissement d’états de synthèse donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et des résultats, dans les conditions fixées par arrêté de l’autorité gouvernementale chargée des Finances;
– S’engager à fournir les informations requises et s’astreindre au contrôle administratif prévu par la législation et la réglementation en vigueur.
Aziz EL YAAKOUBI
Source : http://www.leconomiste.com