Pour éviter aux justiciables de longs déplacements, surtout dans le cadre d’affaires urgentes, le président du tribunal de première instance de Midelt a dévolu ses compétences présidentielles de juge des référés et juge des ordonnances sur requête, au juge résident d’Er-rich.
Une expérience judiciaire inédite a été lancée en 2018 par Reda Belhoucine, président du tribunal de première instance (TPI) de Midelt. Ce dernier a dévolu ses compétences présidentielles de juge des référés et juge des ordonnances sur requête au juge résident d’Er-rich, une ville située à 70 km de Midelt.
Cette initiative “a permis aux habitants de la région d’économiser du temps et de l’argent grâce à la concrétisation d’un rapprochement de l’administration judiciaire vers les citoyens”, confie Reda Belhoucine à Médias24. Au bout de deux années à la présidence de cette juridiction (2016-2018), le président du TPI de Midelt dit avoir “observé les difficultés auxquelles sont confrontés les justiciables vulnérables”.
“D’Er-rich à Midelt, il faut compter une distance de 70 km, soit 2h20 min pour un aller-retour. Sans oublier qu’en hiver, surtout lorsqu’il neige, la route entre les deux villes est bloquée. Il est donc impossible pour les citoyens de se rendre au tribunal pendant ces périodes-là”, explique le président du TPI. D’après lui, d’autres villes sont concernées par cette problématique d’éloignement. Il s’agit notamment de Gourrama et d’Imilchil. Cette dernière est “à quatre heures de route de Midelt, mais à seulement deux heures et trente minutes d’Er-rich”.
« Il faut comparer le juge des référés aux urgences des hôpitaux »
Cette initiative est donc également bénéfique pour les habitants des villes avoisinantes qui, désormais, n’ont plus besoin de se déplacer jusqu’à Midelt pour des affaires à caractère urgent, car les compétences dévolues au juge résident d’Er-rich lui permettent de recevoir les requêtes et de statuer en référé.
“Il faut comparer le juge des référés aux urgences des hôpitaux. Ce n’est pas la médecine générale mais les urgences qui doivent être à proximité des citoyens isolés. Or, ici c’est la justice lente qui est dévolue au juge résident, alors que le juge des référés – celui qui doit agir vite – est éloigné. Le temps de se déplacer jusqu’au TPI pour introduire une requête, il est peut être déjà trop tard dans le cadre de certaines affaires”, explique Reda Belhoucine.
En 2021, 25% du total des jugements et ordonnances rendus par le centre du juge résident
C’est donc pour des raisons de déconcentration des compétences que le président du TPI de Midelt a pris la décision d’élargir les compétences “trop limitées” du centre du juge résident d’Er-rich, notamment en lui octroyant les compétences de référé, habituellement centralisées au niveau des TPI au Maroc.
Cette situation a également permis d’alléger les dossiers du tribunal de première instance de Midelt. Selon le président de la juridiction, celui-ci a été allégé du quart de la masse contentieuse présidentielle, sachant qu’en 2021, les jugements rendus par le centre du juge résident d’Er-rich constituaient 25% du total des jugements et ordonnances rendus par le TPI.
Cette expérience, la première au Maroc, peut être décidée lors de l’assemblée plénière annuelle d’une juridiction, dans le cadre de la répartition des tâches. “C’est le président qui prend cette décision et délègue ses compétences aux vice-présidents”, indique Reda Belhoucine. Et comme pour toute administration de proximité, cela bénéficie “en premier lieu aux citoyens, notamment les habitants des zones rurales où les juges résidents se situent parfois à plus de 200 km”, déplore-t-il.
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